1) distinguer limage de lécriture (notion de système)
2) le passage de limage à lécriture
3) quelques définitions sur lécriture
a) caractéristiques (données en introduction, OD & J-MS, p301)
b) morphémographie et phonographie
1) les pictogrammes représentent une rupture par rapport à lécriture synthétique
a) lécriture synthétique
b) lécriture analytique
2) préécriture: pictogrammes, images stylisées
3) distinguer le pictogramme de lidéogramme
1. Définition et contexte
a) définition: lécriture phonétique
b) contexte historique
2) des prédispositions sémitiques mais des antécédents égyptiens
a) des prédispositions sémitiques
b) des antécédents égyptiens
3) le proto-sinaïtique: acrophonie et alphabet
a) les inscriptions
1. découverte et recensement de ces inscriptions
2. un nouvel élan dans la recherche: proto-sinaïtique, proto-canaanite et Negev archaïque
b) son origine: trois hypothèses
* thèse A: lhypothèse de la synthèse
** thèse B: lhypothèse de la filiation
*** thèse C: lhypothèse de la création originale
c) un essai de synthèse récent (daprès Proto-Sinaitic Inscriptions)
d) lhypothèse de Darnell, université de Yale
4) deux questions: lordre des lettres et leur nom
a) ordre des lettres
b) nom des lettres
1) naissance de lalphabet arabe
a) la filiation nabatéenne
b) évolution de lalphabet proto-arabe
2) lalphabet arabe
a) remarques générales
b) deux types décriture
* le style coufique
** le style naskhi
3) les ajouts
a) les points diacritiques
b) la vocalisation: matres lectionis
1) distinguer limage de lécriture (notion de système)
« Limage est une proposition visuelle faite à lensemble du groupe et qui combine deux données hétérogènes: une surface [...] et des « figures » [...]. Limage nest pas un système, à la différence de la langue. Elle nexige pas non plus la coprésence dun émetteur et dun récepteur: il lui suffit dun observateur. » {Ecriture, EU}
2) le passage de limage à lécriture
« Lapparition de la divination en Mésopotamie et en Chine constitue, comme lont montré Jean-Marie Durand et Léon Vandermeersch, létape immédiatement préliminaire à linvention de lécriture. Elle témoigne en effet dune première forme de rationalisation de limage [...]. Les figures visibles [sur ce support] sont conçues comme formant système entre elles et sont désormais perçues comme des signes. Quant au devin, il na plus comme fonction, comme le mage, de manifester le pouvoir des dieux en agissant directement en leur nom sur des substances: son ministère consiste strictement à observer des ensembles de traces reconnus comme leur message et à tenter de les interpréter, cest-à-dire, en fait, de les lire. » {Ecriture, EU}
3) quelques définitions sur lécriture
a) caractéristiques (données en introduction, OD & J-MS, p301)
- système sémiotique rangé dans la
classe des notations graphiques, i.e. « systèmes de signes à
caractère duratif ayant un caractère visuel et spatial. »
i.e. les écrits restent...
- elle dénote des unités linguistiques
b) morphémographie et phonographie
« Toutes les écritures
connues se ramènent à deux principes: le principe logographique
ou mieux morphémographique, dans lequel les signes graphiques
dénotent des unités linguistiques signifiantes et le principe
phonographique, dans lequel ils dénotent des unités
phonétiques. » (op.cité, p303)
ensuite on apprend que les alphabets
consonnantiques appartiennent aux écritures segmentales, i.e. «
qui ne tiennent compte que de certains segments de la structure
phonique. » (op. cité, pp306-7)
remarque: outils éco, cunéiformes et hiéroglyphes servaient à noter les inventaires
1) les pictogrammes représentent une rupture par rapport à lécriture synthétique
a) lécriture synthétique
« Elle consiste en des signes ou groupes
de signes représentant tout un énoncé verbal. Cest une
écriture idéographique telle quen ont connu les habitants
de la Sibérie orientale et de lAlaska, les Inuits ou bien
encore les Indiens dAmérique. Ce système nest pas
économique car il nécessite autant de signes que
dénoncés verbaux possibles. [...] Certaines de ces
écritures pourraient avoir été inventées 50.000 ans avant
J.-C. Lécriture synthétique opère au niveau de
lénoncé. » (Guelpa)
sopère alors une rupture:
b) lécriture analytique
« Elle représente un immense progrès. En effet, elle vise à décomposer un énoncé en constituants que nous pouvons appeler mots. Chaque signe écrit sert à noter un mot, une idée. [...] Ce sont des écritures dites idéographiques. [...] Nous dirons que le signe de lécriture idéographique correspond au morphème. [...] en plus du signe sémantique de base, un ou plusieurs signes à valeur purement phonétique qui permettent de préciser le sens du signe de base.[...] Nous pouvons dire que lécriture analytique se situe au niveau morphématique. » (Guelpa)
2) préécriture: pictogrammes, images stylisées
ils vont évoluer comme suit:
=> idéogramme: valeur dun mot tout entier
=> phonogramme: syllabe, consonne isolée (signe phonétique)
=> déterminatif: signe dappartenance catégorielle
chaque signe a plusieurs valeurs
{Alphabet, EU}
3) distinguer le pictogramme de lidéogrammeA. Les premiers systèmes décritures: la rupture pictogrammique
in Dictionnaire encyclopédique de la langue française:
pictogramme: « Représentation figurative stylisée ayant
une fonction de communication, sans référence à loral,
utilisée dans la préécriture. »
idéogramme: « Dans certaines écritures, signe graphique
représenant non pas un son, mais un mot, une notion. »
« De même que le pictogramme peut se
définir comme une version réduite de la figure, on pourrait
dire que lidéogramme est une version systématisée du
pictogramme. Ce qui lie ce signe au langage nest plus de
lordre de la métaphore ou du syncrétisme symbolique mais
de lalternative rationnelle. » {Ecriture, EU}
=> conception graphique dissociée de toute référence
réaliste
=> calibrage, norme
Lécriture, cest aussi des signes, des dessins. Les premières traces apparaissent en Mésopotamie en 3400 av. J-C. Rapidement suivis par les hiéroglyphes égyptiens (?). Les civilisations semblent avoir élaboré leur système décriture de façon indépendante. Au départ, il sagit de pictogrammes: chaque image correspond à un objet précis. Lécriture cunéiforme développée par les Sumériens dans la vallée du Tigre et de lEuphrate est restée pictographique jusquen 1400 av. J-C. Les écritures sont devenues idéographiques, quand lassociation de signes a engendré des sens nouveaux, puis phonétiques, quand les signes ont été mis en correspondance avec des sons.
1. Définition et contexte
a) définition: lécriture phonétique
« Elle note les sons. [...] Nous atteignons le niveau phonématique. [...] on distingue les écritures syllabiques (par exemple lécriture chypriote) et les écritures alphabétiques. Ces dernières notent distinctement voyelles et consonnes. Certaines ne notent que les consonnes et, dès lors, la racine de trois consonnes constitue une unité sémantique. » (Guelpa)
b) contexte historique
« [...] il semble bien que lalphabet
ait pour sa part une origine unique, et quil constitue une
invention sémitique née au deuxième millénaire avant notre
ère dans une région correspondant aujourdhui à la Syrie,
au Liban, à Israël et à la Jordanie. » (Février, p121)
« Deux grands systèmes au moins coexistent
en effet, tous deux mélangeant le principe idéographique et le
principe phonographique:
- le système suméro-akkadien
- le système égyptien (hiéroglyphes et écriture hiératique,
cest-à-dire cursive) » (op. cité, p123)
2) des prédispositions sémitiques mais des antécédents égyptiens
a) des prédispositions sémitiques
« Or les langues sémitiques ont une configuration qui nest pas étrangère à lévolution du système des cunéiformes vers le principe alphabétique: chacun des « mots » y est formé dune racine consonnantique (en général trois consonnes) qui « porte » le sens tandis que les voyelles [...] et certaines modifications consonnantiques indiquent plutôt la fonction grammaticale. » (op. cité, p123)
b) des antécédents égyptiens
« lécriture consonnantique
sémitique »
« J. Leibovitch a précisément appelé lattention
récemment sur certaines cryptographies employées dans
lécriture égyptienne à lépoque de la xviiiè
dynastie et qui repose aussi sur lemploi dun système
acrophonique*. [...] Il semble donc que, contrairement à la
théorie en vogue aujourdhui, lacrophonie était en
faveur en Egypte dès le milieu du -iiè millénaire , et
peut-être même avant. » (Février, p182) photocopie fig. 47.
* lacrophonie consiste à figurer
un son par un mot qui commence par ce même son. Par exemple /b/
sera désigné par le mot sémitique */beyt/. cf nom des lettres.
3) le proto-sinaïtique: acrophonie et alphabet
a) les inscriptions
1. découverte et recensement de ces inscriptions
Hiver 1904-05, William Petrie découvre les
inscriptions de Serabit el-Khadim
En 1916, Alan Gardiner déchiffre le mot
blt. Il en conclut que les signes sinaïtiques ont été
créés en réformant les hiéroglyphes égyptiens à partir de
leur valeur acrophonique.
Les expéditions dHarvard (1927,
1930-35), mettent à jour de nouvelles inscriptions.
En 1966, Albright fait un grand pas en avant
en proposant des transcriptions et des traductions (certes,
sujettes à caution) de toutes les inscriptions jusqualors
recensées comme proto-sinaïtiques.
2. un nouvel élan dans la recherche: proto-sinaïtique, proto-canaanite et Negev archaïque
Itzhaq Beit-Arieh, de luniversité de
Tel-Aviv, a été à partir de 1971 le directeur de
lexpédition Ophir dans le Sinaï. Ses travaux ont permis
de dater plus précisément lémergence du
proto-sinaïtique vers -1700 et sa maturité en tant
qualphabet aux environs de -1500. Une des plus anciennes
inscriptions, sur rocher, porte le nom El.
En 1988, une thèse doctorale, intitulée «
The genesis of the alphabet and its development in the second
millenium BC », fut présentée à luniversité de
Tel-Aviv par Benjamin Sass, un élève de Beit-Arieh. Il pose
entre autres conclusions:
« The origin of the Phoenician letters [and even more so the Old
Negev letters] in the Proto-Canaanite and Proto-Sinaitic scripts,
and the borrowing of most, if not all, letters forms in the
latter script from Egyptian hieroglyphics on the basis of
acrophony are now seen as indubitable fact (cf. Snyczer, 1974,9).
»
Harris & Hone ont à présent un corpus de
plus de 130 inscriptions du Negev. Des 22 signes retenus ils ont
conclu quun grand nombre des formes archaïques
persistaient et que le Negev archaïque est un ancien parent des
inscriptions thamoudéennes.
b) son origine: trois hypothèses
* thèse A: lhypothèse de la synthèse
« F.Delitzsch [...] Cet alphabet représenterait, selon lui, une fusion très adroite des avantages respectifs du hiéroglyphe égyptien et du cunéiforme. Les Phéniciens auraient emprunté à lhiéroglyphique le système acrophonique [...] Des babyloniens ils auraient appris à figurer les lettres par des dessins plus schématiques; quelques noms de lettres (hê-tu, nûnu...) auraient été empruntés au syllabaire akkadien; enfin une quinzaine de signes servant à noter les consonnes de lalphabet phénicien se retrouveraient parmi les caractères fondamentaux de lécriture cunéiforme; les autres en revanche auraient été forgés par les Phéniciens eux-mêmes. [...] Ce dernier {H. Zimmern} insiste en particulier sur le fait que lordre des lettres phéniciennes et les noms de ces lettres se retrouveraient en grande partie dans le syllabaire akkadien. » (Février, p192)
** thèse B: lhypothèse de la filiation
ensuite Février présente la tentative de
« relier définitivement lécriture protophénicienne
(protocanaanite) par le haut au protosinaïtique et par le bas au
phénicien archaïque. » (p183)
cependant, il se pose le problème de la
nature de la filiation, du passage: « Il reste à déterminer en
particulier si lévolution qui a conduit de la
protosinaïtique à la protocanaanite et de celle-ci à la
phénicienne archaïque de Byblos a été automatique, machinale
ou si elle a été coupée par deux ou trois étapes... »
(Février, p184)
*** thèse C: lhypothèse de la création originale
photocopie fig. 53 p198
« [...] lessentiel, dans
lécriture phénicienne, a été darriver à
concevoir clairement la possibilité de noter nimporte quel
mot à laide des seuls signes consonnantiques [...] Quant
au choix des caractères, il relèverait selon les uns de
larbitraire le plus complet, tandis que daprès
dautres, il serait dû au moins en partie, à un choix
raisonné parmi des formes préexistantes dans dautresd
systèmes graphiques, mais sans se préoccuper de la valeur
phonétique quelles pouvaient avoir. » (Février,
pp198-9)
« Lécriture égyptienne possédait
bien un jeu de 24 signes consonnantiques qui permettait de
décomposer tout mot en ses éléments constitutifs. »
(Février, p199)
N.B.: Le raisonnement p199 est un développement très
éclairant.
« Ce savant {E. Dhorme} en effet a montré
que les Phéniciens de Byblos, lorsquils sont passés, pour
la notation de leur propre langue, de lécriture syllabique
(pseudo-hiéroglyphes) à lécriture alphabétique (dite
phénicienne archaïque), dune part ont recouru dans
beaucoup de cas, à des signes appartenant à la première, mais
leur ont affecté dordinaire des valeurs consonnantiques
toutes différentes de leurs valeurs phonétiques antérieures.
» (Février, p201)
c) un essai de synthèse récent (daprès Proto-Sinaitic Inscriptions)
« This required working out a new
set of relationships since pictography is language specific »
(p5)
2 contraintes simposent à la composition dun nouvel
alphabet:
=> pictographique
=> acrophonique
« A new alphabet was required » (p6) on the principle of
acrophony (contrairement aux Grecs plus tard)
« A letter consists of a name, sound, shape
and reference » (p6)
lacrophonie:
« A key to understanding the transition that occured around 1800
b.c., is another alphabetic principle that disappears from all
scripts developped after 1000 b.c., this is usually referred to
as acrophony (literally initial or topmost sound) but is actually
a combination of pictography, naming the picture and using the
initial sound in the name as the sound associated with the letter
shape. » (p7)
évolution de cet alphabet
proto-canaanite
« Over a period of 300 or so years, proto Canaanite
appears to have evolved into several semitic scripts.[...] At
around 1300 b.c., a branch of the evolving Proto-Canaanite broke
off and spread into the southern part of the Arabian Peninsula.
This proto-Arabian script eventually evolved by the 5th century
b.c. into the highly elegant South Arabian script. »
photocopie pp227-229 (signification des lettres)
d) lhypothèse de Darnell, université de Yale
« Une équipe menée par John Coleman Darnell, égyptologue de luniversité de Yale, a découvert en 1993-94 des inscriptions gravées dans du calcaire à Wadi el Hol, à 80 km de Louxor. Après analyse, il les fait remonter maintenant à 1800 avant Jésus-Christ [...] lalphabet aurait été créé en Egypte par des populations de langue sémité, sans doute des mercenaires employés par des Egyptiens, qui auraient voulu simplifier les hiéroglyphes [...] le chercheur américain saffirme alors « certain à 99,9% que la première écriture alphabétique a été développée par des peuples de langue sémitique dans un contexte égyptien. Ces signes dérivent de signes égyptiens et ils nous permettent de dire que lalphabet a été inventé autour de 2000 avant J-C par une collaboration entre les Egyptiens et leurs employés de lOuest asiatique (la région syro-palestinienne, ndlr) » [...] mais les lettres et les groupes de mots que lon peut déchiffrer « sont très proches de lakkadien »
4) deux questions: lordre des lettres et leur nom
a) ordre des lettres
« Il est frappant, pour les deux premiers alphabets déchiffrés (ougaritique et phénicien), que lordre des lettres y soit le même et corresponde à peu près à celui des alphabets ultérieurs. Cest à dire que cest ordre serait très ancien, sans que lon sache vraiment doù il peut venir. » (Calvet, p126), peut-être un moyen mnémotechnique
b) nom des lettres
« Et ce problème de lordre des
lettres se double de celui du nom des lettres » (Calvet, p126)
la réponse ne se fait pas attendre:
« si le nom de chaque lettre désignait à
lorigine sa forme, [...] alors la lettre elle-même
pourrait venir dun pictogramme et le rapport entre ce
pictogramme et la lettre serait acrophonique. » (Calvet, p127)
« on peut songer à la séquence suivante:
court développement sur la méthode de
Gardiner
photocopier pp128-132 pour la liste des acrophonies.
« Enfin [que] la filiation
protosinaïtique-phénicien-grec-latin est en revanche
incontestable car elle sappuie à la fois sur des
convergences de forme, de nom et de valeur des lettres. »
(Calvet, p132)
« [...] tous ces alphabets viennent, par
acrophonie, dun système de notation syllabique » (Calvet,
p133)
photocopie tableau p135
origine commune à lalphabet consonnantique linéaire
phénicien (xiè av. J.-C.) et au prototype des alphabets de la
péninsule arabique.
1) naissance de lalphabet arabe
a) la filiation nabatéenne
lécriture nabatéenne dérive
directement du phénicien
« Au -iiè siècle environ apparaît à El
Ela lécriture nabatéenne, une des variétés de
lécriture araméenne. Cest donc une écriture
nord-sémitique, dérivée elle-même de lalphabet
phénicien, qui se substitue à une écriture sud-sémitique. »
(Février, p263)
« Lorsquils avaient à écrire, les
Arabes utilisaient un alphabet dérivé du phénicien,
lalphabet nabatéen, mais écrivaient dans la langue
commerciale de lépoque, laraméen. Et cest cet
araméen en alphabet nabatéen qui va peu à peu sarabiser
pour donner naissance à lalphabet arabe actuel » (Calvet,
p187)
=> les nabatéens parlaient une dialecte arabe mais
écrivaient en araméen (langue majeure, commerciale)
=> multiplication des arabismes à partir de la décadence
(+106)
Les populations arabes continuent
dutiliser lalphabet nabatéen mais en substituant
larabe à la langue araméenne
mentionner linscription d En Nemâra (+328) en arabe,
tombe dImroulqais. (Calvet, p187)
filiation araméen => nabatéen => arabe ivè siècle =>
arabe moderne (Calvet, p188)
« En fait ce sont les ligatures qui ont fait évoluer la
notation de B, N, T, Y et TH. » (Calvet, p188)
b) évolution de lalphabet proto-arabe
inscription trilingue dEz-Zabad (+512-513) en grec,
syriaque et arabe
« A en juger par la région où ont été
retrouvés la plupart de ces textes, à savoir dans le Haurân,
[...] on serait tenté de mettre en rapport lévolution
progressive de lalphabet arabe avec lavènement de la
dynastie des Ghassanides. Mais il faut prendre garde au fait que
la transformation de lancien alphabet nabatéen semble
sêtre opérée, au moins en partie, le long des routes
commerciales du Hedjaz, et aussi que la tradition des auteurs
musulmans (Ibn Qoutayba, Tabâri, Abou lFaradj) souligne au
contraire le rôle de Hîra et dAnbar, sur lEuphrate,
comme centres de la vie intellectuelle arabe; ils insistent sur
linfluence de la famille de Adi ibn Zayd, le poète
chrétien de Hîra, qui aurait vécu à la cour de Chosroès II
et aurait été le premier, à la cour de ce monarque, à écrire
en arabe. Cest donc dans le royaume arabe des Lakhmides,
rival de celui des Ghassanides, quaurait eu lieu
lélaboration définitive de lécriture arabe. »
(Février, pp264-265)
origins of the arabic script (in Healey)
« But meanwhile, the likely solution to the
problem of the apparent gap between the Namâra and late Nabatean
scripts on the one hand and the earliest (western cursive) Arabic
on the other can be seen in the fact that the more cursive forms
close to early Arabic already existed in the 1st and early 2nd
centuries A.D. They are found in the Nabatean papyri and dipinti
referred to earlier and presumably continued in use. [...] But it
is not the Nabatean graffiti that led to the Arabic script: that
that came rather from the Nabatean cursive, which has largely
perished with the perishable material on which it was written. »
(Healey)
2) lalphabet arabe
a) remarques générales
« Ecriture de type alphabétique et
phonologique, relevant du vaste groupe des écritures
sémitiques, elle présente à ce titre les caractériqtiques
dune écriture consonantique, à signes vocaliques ajoutés
sous formes daccents, et appartient ainsi à la catégorie
des écritures dont « lorthographe comporte toujours un
élément dinterprétation par le lecteur, ou
idéographique (La grande invention de lécriture et son
évolution, M.Cohen, 1958). » (EI, KHATT)
Elle comporte un élément de sacralité, dont
on peut donner une double explication: => lécrit est
marqué par le sceau de la magie dans les sociétés de
loral, cependant, comme le fait remarquer Healey, il
existait une forte tradition calligraphique avant lIslam,
qui relativise les clichés liés à une société
anté-islamique uniquement fondée sur loral.
=> le passage schématique de loralité à lécrit
dans la culture arabe marque un changement des mentalités,
jusqualors fortement enclines à limmanence (comme en
rend compte la poésie jahilite), vers la transcendance, en
dautres termes dune parole evanescente à un écrit
« trace ». Le mot arabe jâhiliyy est un néologisme coranique
qui peut être opposé à lexpression ?ahl al kitâb. Une
nouvelle civilisation naît, le Coran est, dans la tradition, le
premier livre de la culture arabe, véritable « miracle
linguistique ».
« La pratique de lécriture arabe
était dès lors un art aussi bien quune science reservée
à ds initiés. De même les maîtres en calligraphies
étaient-ils jugés dignes, ainsi que cela demeura ensuite la
règle générale dans toute la société musulmane,
datteindre à la double célébrité de lartiste et
du savant respecté, accédant parfois au rang de maîtres de la
science des lettres, elle-même branche de la science divinatoire
du djafr et instrument dun art talismanique lié à
certains aspects de la spéculation mystique. » (EI, KHATT)
b) deux types décriture
« [...] se sont différenciés des types décritures
réservées à certains usages [...] Mais il faut, en tout état
de cause, admettre que la nature de la technique pratiquée
suffit souvent à expliquer les variations à la fois multiples
et concurrentes, sans être demploi exactement
synchronisé...» (EI, KHATT)
Après lavènement de lislam, on a
de plus en plus de témoignages épigraphiques, un des plus
célèbres étant linscription du dôme du rocher.
Coexistent alors deux types décriture, « lune
anguleuse, rigide, dallure ornementale, lautre est
cursive coulante, souple, aux formes arrondies.
La première est appropriée à la gravure sur
un support dur, pierre ou métal, ou encore sur un support
résistant et quelque peu rugueux, comme le cuir ou le parchemin,
tandis que la seconde convient mieux à la graphie rapide sur
papyrus. Comme on le voit, la différence entre les deux
écritures tient surtout au matériel employé. » (Février,
p266)
Cela donnera naissance à deux styles:
« Des deux types décriture que nous
avons distingués plus haut, le premier se rattache à la graphie
des inscriptions préislamiques du viè siècle. Dans le Fihrist
qui fut écrit en 987/8 En Nadîm lui donne le nom de coufique.
» (Février, p266)
* le style coufique
style anguleux, tend à se compliquer vers
un coufique orné (arabesques, ligatures, emmêlements), reservé
à la graphie des premiers corans, des documents protocolaires,
aux inscriptions monumentales et hiératiques (sacrées):
=> coufique tressé, hampes entrelacées (parties verticales
du dessin de certaines consonnes qui dépassent vers le haut ou
vers le bas: h, p)
=> coufique fleuri ou carmatique, ornementée et raffinée
jusquà en être inintelligible
coufique => maghrébine, andalouse, fezzane, soudanaise
** le style naskhi
écriture ronde, cursive
naskhi => thuluth, nastaliq persan, diwani turc
3) les ajouts
a) les points diacritiques
Ce principe existait déjà dans les
traditions Palmyréenne, Syriaque et Nord-Mésopotamienne. Ainsi
le Palmyréen distinguait le /r/ du /d/ par un point.
« Dautre part, certaines des lettres
nabatéennes avaient fini par se confondre: dans lalphabet
arabe actuel, les 22 signes nabatéens ont été réduits à 17.
Il en résulte que les risques de méprise sont fréquents [...].
Aussi a-t-il fallu avoir recours aux points diacritiques.
Cest en syriaque quon a employé surtout des points
diacritiques pour distinguer des consonnes de même forme. Mais
les Nabatéens aussi ont eu recours, à loccasion, à ce
procédé comme les Palmyréniens, pour distinguer le R et le D
» (Février, p269)
« Par ailleurs des signes diacritiques
différencient les consonnes confondues par les ligatures. On
attribue cette invention à deux disciples de Abou al Aswad
al Douali, Nasr ibn Asim et Yahia ibn Yamour » (Calvet, p189)
b) la vocalisation: matres lectionis
Il faut aussi perfectionner
le système afin de noter la vocalisation (motivée par des
pressions religieuses mais aujourdhui encore jugées très
scolaires ou bien réservées au Coran et à la poésie; on ne
vocalise pas une lettre, cest insultant) et les points
diacritiques. (Février)
« Abou al Aswad al Douali, au viiè
siècle, associe un point rouge à la consonne: au-dessus il note
un a, au-dessous un i, à côté un u. Ce système, ensuite,
évolue: au viiiè siècle, al Khalil ibn Ahmed al Faradihi le
modifiera pour lui donner sa forme actuelle. » (Calvet, p189)
remarques:
rapidité (// sténographie)
facteur dunité entre les différentes parties du monde
musulman
sert aussi à noter des langues non sémitiques
On a vu schématiquement une évolution de
lécriture axée autour de deux ruptures: la première que
lon qualifiera de pictogrammique, la seconde
dacrophonique.
Lécriture arabe est de type
phonétique, consonantique. Sémitique, on a vu comment elle
dérive des écritures proto-sinaïtiques, par le phénicien et
le nabatéen. Il faut également garder à lesprit les
enjeux liés au passage de loral à lécrit, dont
lislam nest que le déclencheur car la société
antéislamique disposait déjà dune base écrite.
Lécriture arabe sest divisée en deux grandes
branches, lune monumentale à lorigine (le coufique),
lautre cursive (le naskhi).
On remarque quil ny a pas (ou fort
peu) de désaccord entre la graphie et la prononciation en arabe.
Le passage de lalphabet idéographique
à un syllabaire puis à un alphabet doit être comparé à la
double articulation saussurienne.
* morphémographie et phonographie
« Toutes les écritures connues se ramènent à deux principes:
le principe logographique ou mieux morphémographique, dans
lequel les signes graphiques dénotent des unités linguistiques
signifiantes et le principe phonographique, dans lequel ils
dénotent des unités phonétiques. » (O&D, p303)
« Il ny a que deux systèmes décriture: le système
idéographique [...], le système phonétique [...]
dailleurs les écritures idéographiques deviennent
volontiers mixtes » (CLG, p47)
Développement :
« [...] lexistence dans les Balkans dune
civilisation pré-indo-européenne à écriture, la culture
Vinca: daprès les dernières datations contrôlées à
laide de la dendrochronologie les plus anciens documents
découverts remonteraient au viiè millénaire avant J.-C., alors
que jusquà récemment on pensait que linvention de
lécriture ne datait que du ivè millénaire, époque des
premiers témoignages de lécriture sumérienne. » (p309)
Ces sources m'ont été très précieuses dans l'élaboration de cet exposé, tant par leur contenu que par leur clarté. Quant à l'exposé en lui-même, il a été réalisé dans le cadre d'un cours de linguistique de licence.
Louis-Jean CALVET, Histoire de lécriture,
pp121-136 / pp187-192, Plon 1996
Oswald DUCROT & Jean-Marie SCHAEFFER, Nouveau dictionnaire
encyclopédique des sciences du langage, pp301-310, Points
Essais 1995
James FEVRIER, Histoire de lécriture, pp172-278,
Payot 1959 (bibliographie très fournie quoique datée)
Patrick GUELPA, Introduction à lanalyse linguistique,
pp13-15, Armand Colin 1997
Merritt RUHLEN, Lorigine des langues, Débats Belin
1997
Ferdinand de SAUSSURE, Cours de linguistique générale,
pp44-54, Payot 1916 commentaires de Tullio de Muro 1967
Dictionnaire encyclopédique de la langue française
dans lEncyclopedia Universalis 1997
Alphabet, Gilbert LAFFORGUE
Ecriture, Anne-Marie CHRISTIN & Jean-Marie BALPE
dans lEncyclopédie de lIslam
Khatt, J.SOURDEL-THOMINE
quelques éléments intéressants même si cet article est plus
un catalogue d'épigraphie qu'une analyse conceptuelle de
l'évolution de l'écriture
Les premières lettres de lalphabet, Sylvie Briet, sur les recherches de John Coleman Darnell (université de Yale), Libération 23/11/1999 p35
Development of the Alphabet, Steve BETT,
http://pages.whowhere.lycos.com/community/sbett/alphabet.html
Nabatean to Arabic: Calligraphy and script development among the pre-Islamic Arabs, John F. HEALEY, Manuscripts of the Middle East 5 (1990-1991), Leiden
Proto-Sinaitic Inscriptions, ?, site internet autour du livre Ancient rock inscriptions, LENDER, Israel Antiquities Authority
Laventure des écritures, chronologie sommaire, site de la Bnf
Laventure des écritures, bibliographie, site de la Bnf
The power of writing, ?; site internet hébergé par Geocities
dernière mise à jour: le 4 juillet 2000
Sébastien Garnier